Brest perd un départ de tour du monde, et pas des moindres, puisque la mission Jeanne-d’Arc s’ébranlera,en mars2012,de Toulon. Il fallait s’y attendre.
Le précédent chef d’état-major de la Marine, Pierre-François Forissier, avait pourtant rappelé son attachement à la mission Jeanne-d’Arc, qui sert à l’ultime mise en situation des futurs officiers de Marine. Il avait rappelé l’importance symbolique de faire partir les élèves de Brest, à quelques encablures de leur école enracinée à Lanvéoc-Poulmic. Cela faisait presque 100 ans que les officiers-élèves partaient de Brest, près d’un siècle que les scènes touchantes sur les quais faisaient de Brest le port départ des plus belles circumnavigations militaires.
Logique comptable
Mais c’est vrai qu’en perdant le porte-hélicoptères en 2010 et en sollicitant les bâtiments de projection et de commandement (BPC) toulonnais, Brest s’imposait moins comme port de départ. Au-delà du symbole, faire remonter un navire de Toulon pour le faire repasser deux semaines plus tard au même endroit se justifie difficilement sur le plan comptable. La Marine avait pourtant effectué la manip’ l’année dernière en expliquant qu’un navire, quel que soit son trajet, est occupé à la mer de la même façon. Mais, cette année, la livraison du BPC Dixmude à la Marine, alors qu’il n’est toujours pas admis au service actif, bouscule les plans. Lenavire doit enchaîner une série de mises en situation et devra procéder à la qualification opérationnelle de l’équipage, avant de s’en aller. Ce n’est qu’à l’issue de cette campagneque le BPC sera admis auservice actif.
Un départ de moins
En faisant appel aux BPC toulonnais, la nouvelle n’est pas si étonnante que cela. Mais, pour la ville de Brest, la décision est dure à encaisser. En termes d’image et de rayonnement, le départ de la mission Jeanne-d’Arc est toujours un coup de projecteur valorisant, dans un contexte où la ville accentue ses efforts pour attirer les tourdumondistes de tout poil. Brest, ville de départ, fenêtre ouverte sur le monde! Avec ce départ de Toulon, le 5 mars, la mission Jeanne-d’Arc perd une partie de son âme. La frégate Georges-Leygues appareillera toujours de Brest, le 27 février, alors que le retour de la mission pour les deux navires est, pour le moment, prévu à Brest. On se souvient, l’année dernière, que les élèves avaient été débarqués à Toulon et que la mission s’était achevée à Brest sans marquer le coup.
Cent ans cette année
Que reste-t-il de la Jeanne-d’Arc et son esprit? Pour Jean-Jacques Messager, président des anciens marins de la Jeanne, le coup est dur mais les mots sont, comme d’habitude, des plus choisis. «C’était prévisible, en ces temps de restrictions budgétaires. Il faut une douzaine de jours pour faire l’aller-retour (avec trois jours de ravitaillement à Brest). Mais c’est dommage, alors que le premier départ de la Jeanne à Brest (le croiseur-cuirassé) a eu lieu en 1912, il y a pile 100 ans».
Article de Stéphane Jézéquel du 29 décembre 2011 – Le Telegramme