J’ai assisté le 20 septembre 2013 de 19h00 à 23h00 avec une cinquantaine de personnes à la conférence donnée par Benjamin Sonntag (@vincib).
Je vous en relate l’ambiance ci-dessous :
J’arrive à18H45, un peu stressé et affamé. Je ne connais pas l’endroit et suis un peu intimidé par les pointures que je vais croiser.
Vu que je suis l’un des seuls en costard, les gus doivent penser que je suis de la NSA ou du service d’ordre. L’assemblée est en effet largement bigarrée, de 18 à 78 ans et rafraichie à la bière. Je n’ose pas aller au comptoir en commander une, de peur de perdre ma place privilégiée plein axe au troisième rang. On est loin de l’ambiance feutrée proutprout du salon « DSI de l’année ». Ici, c’est cool attitude et coupe de cheveux hors standard. Les auditeurs arborent majoritairement le look hacktiviste assorti de l’ordinateur portable recouvert de stickers à l’effigie des grands rendez-vous du hacking. A côté d’eux, le moindre startuper de la Silicon Valley ferait BCBG coincé !
Je reconnais dans l’assemblée quelques visages révélés par Twitter. Je remarque qu’il y a même quelques sujets féminins, un spectateur dont l’allure est quelque part entre clodo, Richard Stallman et Léo Ferré, un sosie du frère du père noël, quelques tronches de vieux hippies, une poignée d’étudiants en école d’informatique qui ont dû arrêter toute activité sportive en CE2, un couple de cinquantenaires visiblement égaré, quelques consultants encostumés, un extra-terrestre iroquois … et Benjamin Sonntag. On reconnait dans le regard de chacun d’eux la petite lueur de la passion. On ne vient pas un vendredi soir après le boulot à la Cantine comme on va assister au dernier Workshop Microsoft Winbouse2013 ou au talk branché Apple merde-I-5f pour se la couler douce une demi-journée.
Affairé à ses derniers préparatifs, Benjamin est serein et déterminé. On devine la maitrise du sujet à peine perturbée par les couacs du tcpDump.
Après avoir salué l’assistance, il nous embarque pour près de trois heures dans l’univers de TLS, des certificats et autorités de certification, des courbes elliptiques et de Diffie-Hellman… mais aussi dans le monde de la sécurité au sens large et du respect de la vie privée. Quelques centaines de minutes de discours posé, précis, argumenté, illustré d’exemples, de démos et d’anecdotes. Ca s’écoute comme une belle histoire… J’aurais pu venir avec ma mère. Ressurgissent régulièrement les références à son quotidien et ses activités au sein de La Quadrature de Net. Transparait le côté humaniste du personnage.
Dans l’assistance ça ne bronche pas, le bagage technique moyen étant élevé, on va pouvoir aborder une bonne partie de la technicité du problème sans lassitude. Je ne résumerai pas le contenu formel de la présentation, dont on retrouvera bientôt l’intégralité ici sur le web, de peur de le dénaturer et de ne pas en reproduire l’exhaustivité.
Reprenant Bruce Schneier et Snowden (Prix Nobel de la paix 2025 ?), Benjamin insiste largement sur le fait que la crypto nous apporte le niveau de sécurité et de confidentialité que l’on se doit d’attendre d’elle. Le chiffrement, malgré la fragilité du modèle de confiance fourni par les autorités de certification commerciales et les difficultés de protéger les sacro-saintes clefs privées est sûr ; Même s’il est techniquement possible de casser du RSA 1024 pour quelques millions de dollars, le maillon faible est bien ailleurs … à la fois dans la faiblesse, l’inconsistance, et les motivations inavouables toutes malheureusement humaines. Ce sont celles-ci qui font qu’il existe aujourd’hui des implémentations de protocoles sécurisés pourries utilisant des algorithmes cassés ou conçus avec des portes dérobées ou pire, car de manière généralisée, fonctionnant sur des plateformes matérielles pour le moins dangereusement hermétiques.
Alors, pour se protéger, comment faire ?
Ne pas avoir une confiance aveugle envers les marchands de solutions de sécurité qui vous vantent/vendent leur « cryptage » propriétaire inviolable. Faire confiance, avec un œil critique, à la crypto dont le code source est ouvert et auditable. Comprendre les mécanismes mis en œuvre afin de vérifier que votre entreprise ne vous offre aussi gentiment que secrètement un joli certificat de chez Bluecoat qui lui permet de déchiffrer tous vos échange HTTPS. Etre en mesure d’expliquer à tout un chacun les objectifs de la sécurisation des échanges dans le respect de la vie privée afin de ne pas tomber, sans s’en rendre compte dans le piège des Google, Paypal et consorts ou de se faire pirater ses comptes par le premier script kiddy en omettant le « s » de HTTPS.
Toute la conf est disponible en vidéo et les diapositives du support sont téléchargeables ici. Du vraiment bon boulot !